Analyses d'ouvrages

2020 - Le dédale de l’information numérique

L'Education critique

Se repérer dans le dédale actuel de l’information, éviter les pièges et les chausse-trappes, se construire une éducation critique, les deux livres proposés ici arrivent à point nommé pour nous aider et nous assister dans ce difficile processus. Ce n’est pas un hasard s’ils sont publiés aujourd’hui. Ils se complètent l’un l’autre.

Éducation critique aux médias et à l’information en contexte numérique, sous la dir. de Sophie Jehel et Alexandra Saemmer, Presses de l’Enssib, 2020, Collection « Papiers », ISBN 978-2-37546-126-6, 29 euros (éd. papier) ; 17.40 euros (PDF).

Décoder les fausses nouvelles et construire son information avec la bibliothèque, sous la dir. de Salomé Kintz, Presses de l’Enssib, 2019, Collection La Boîte à Outils 48, ISBN 978 -2-37546-120-4, 22 euros (éd. papier) ; 13.20 euros (PDF).

Publié dans la collection « Papiers » des Presses de l’Enssib qui se veut un reflet de la recherche actuelle en SIC, l’ouvrage sur l’éducation critique au média rassemble une vingtaine de contributions de chercheur-ses sous la direction de Sophie Jehel et Alexandra Saemmer respectivement maitresse de conférences et professeure en sciences de l’information. Elles sont en outre membres du Centre d’études sur les médias, les technologies et l’internationalisation.

La première partie « Eduquer à l’information, décoder les infomédiaires » rassemble plusieurs sujets : notamment la désinformation et les enjeux de l’éducation aux médias (chap. 1, 8 et 9), la violence sur Internet vis-à-vis des adolescents (chap. 2), le mouvement du logiciel libre (chap. 4), la société de contrôle (chap. 3), la reprise du contrôle affectif (chap. 6), des intermédiaires de l’information peu portés sur l’éthique et la neutralité (chap. 5, 6 et 7). Les nombreux dispositifs numériques sont pour la plupart détaillés, mais ce qui est le plus intéressant c’est bien sûr la dénonciation des effets négatifs de ces dispositifs.

La deuxième partie, « Approches réflexives et créatives des médias », se propose d’inventorier les moyens de mettre en place une véritable éducation critique afin de répondre aux enjeux précité : la question du genre est abordée (chap. 10), et celles de la complexité du paysage numérique (chap. 11) ou de la lecture numérique (chap. 12 et 14). La sémiologie sociale (chap. 12) peut aussi être utilisée, ou la pédagogie des médias scolaires (chap. 13) et de la création théâtrale (chap. 18). Il ne faut cependant pas négliger l’apport essentiel des chercheurs (chap. 10), des enseignants et professeurs-documentalistes (chap. 17) ou même des adolescents (chap. 15 et 16).

Le second ouvrage, « Décoder les fausses nouvelles et construire son information avec la bibliothèque » est dirigé par Salomé Kintz, conservatrice de bibliothèque. ll convoque quinze auteur-e-s qui ont tou-te-s pour point commun de décrypter ce phénomène apparu il y a une dizaine d’années, celui des fausses nouvelles ou fake news (première partie) : il semble être essentiellement attaché à l’apparition d’Internet, ainsi que de son utilisation par les jeunes générations. Cela interroge également le rapport entre science et désinformation, ce qui prend un écho singulier à l’heure de l’épidémie de COVID 19. Développer l’esprit critique n’est-il pas un des rôles de la bibliothèque ? C’est une véritable interrogation.

Cependant, il semble que les bibliothèques saisissent leur chance (seconde partie) en multipliant ateliers, informations, actions à destination de différents publics : collégiens, étudiants, ou public en général.

La question des compétences informationnelles (troisième partie) est évidemment au centre du débat : il ne s’agit plus seulement de former à l’information, mais également de prendre en compte le contexte numérique. Les bibliothécaires sont-ils armés pour cela ? Faut-il renforcer leurs compétences déjà nombreuses en la matière ? Cet ouvrage, qui s’inscrit dans le brûlant contexte actuel, pose véritablement les bonnes questions.

Très complémentaires, ces deux ouvrages sont à lire de manière consécutive tant ils s’enrichissent l’un l’autre, et contribuent à la définition du rôle actuel des bibliothécaires.

Jean-Philippe Accart

Publié dans la revue Lectures-Cultures de la Fédération Wallonie Bruxelles, novembre-décembre 2020.

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