International
2002 - IFLA Glasgow (Grande-Bretagne) (bis)
La Déclaration de Glasgow
Archimag, 2002, n° 158, pp. 36-38.
La principale fédération d'associations des bibliothèques et des professionnels de l'information a célébré dans l'enthousiasme à la fin du mois d'août dernier son 75ème anniversaire. L'occasion choisie pour cette célébration fut la 68ème conférence annuelle tenue à Glasgow avec un intitulé plus que jamais d'actualité : Bibliothèques pour la vie : démocratie, diversité, délivrance d'information. L'assistance nombreuse (plus de 4700 participants et 125 pays représentés) démontre à l'envi le dynamisme de la fédération, qui est l'instance officielle représentative des professionnels de l'information au plan international. Des initiatives de coopération, des motions pour l'accès à l'information, des prises de position par rapport à la démocratie et à la liberté sont engagées, et même si la fédération se défend de jouer un rôle politique, sa voix est plus que jamais primordiale dans le paysage de l'information actuel.
Un peu d'histoire...
C'est en 1926 que Gabriel Henriot, président de l'Association des bibliothécaires français (ABF), lance un appel pour la création d'une instance internationale représentant de manière permanente les associations nationales de bibliothèques. Cette idée se matérialise à Edimbourg le 30 septembre de cette même année et 15 pays sont signataires. L'IFLA prend sa forme officielle en 1927. L'Europe et les Etats-Unis sont majoritairement représentés et ce, durant plusieurs décennies. L'IFLA est le point de rencontre d'une profession et la notion de " IFLA Family " prend forme et perdure jusqu'à maintenant. Ses trois champs d'action sont principalement les standards bibliographiques, le prêt entre bibliothèques et les échanges, la formation des professionnels. C'est surtout après la Deuxième guerre mondiale que la fédération se développe jusqu'à connaître l'expansion que nous lui connaissons actuellement. Son rôle s'est affirmé, sa présence étendue à plus d'une centaine de pays, le dernier en date étant la Corée du Nord. Son action se porte dorénavant sur la représentation des professions des bibliothécaires, un équilibre Nord-Sud mieux respecté, sur la discussion avec des partenaires incontournables tels les éditeurs ou les archivistes. Elle s'intéresse de près au droit de l'information (un comité a été spécialement créé), à la liberté d'expression, à la reconstruction des bibliothèques en péril (une motion fut votée en ce sens à Glasgow).
Accueillie avec un humour très "scottish " par le lord-maire de Glasgow (" Glasgow est la ville où l'on mange la meilleure cuisine...indienne de tout le Royaume-Uni !!" a-t-il lancé lors de la cérémonie d'ouverture), et par Christine Deschamps actuelle présidente de l'IFLA (" nous sommes dans un pays où McIntoch n'est pas le nom d'une marque d'ordinateur, mais est celui d'un architecte célèbre, Charles Rennie Mackintosh ! "), les congressistes répondirent présents aux nombreuses manifestations d'ordre social et culturel offertes. Des écrivains de renom international représentant la littérature britannique donnèrent des conférences et des lectures en public : outre le poète Eddwin Morgan, le romancier Jim Grace ou Anne Fine surtout connue en tant qu'auteur de littérature jeunesse, un des points d'orgue fut la présence chaleureuse et vivifiante du prix Nobel de littérature 1995, Seamus Heaney, qui lut nombre de ses poèmes inspirés par son enfance, sa mère et un imaginaire relevant du merveilleux devant un auditoire attentif et admiratif.
Présence des éditeurs
La présence des principales maisons d'édition internationales est un des attraits du congrès. La conférence donnée par Derk J. Haan, membre du conseil d'administration de Reed Elsevier et président d'Elsevier Science, fut particulièrement suivie : outre le poids prépondérant de cet éditeur à l'heure actuelle, DJ Haan aborda les enjeux et les résultats du passage des périodiques imprimés aux publications électroniques, en particulier les questions de l'évolution des contenus éditoriaux, de la fonctionnalité des systèmes et des modèles économiques. A terme, l'ensemble des publications électroniques d'Elsevier devraient être archivées et accessibles : un accord sur la conservation numérique vient d'être signé avec la Bibliothèque nationale des Pays-Bas qui devient le premier organisme officiel de dépôt et de conservation des périodiques édités par Elsevier Science, soit 1500 titres de périodiques. Cette question est particulièrement sensible depuis plusieurs années pour les bibliothèques et les éditeurs : l'IFLA travaille sur ce sujet depuis deux ans avec l'Association internationale des éditeurs (IPA).
L'éditeur de périodiques électroniques Emerald a signé des accords importants de diffusion de ses collections, notamment avec de grands consortiums de bibliothèques. Spécialisé dans les domaines du marketing, du management, des ressources humaines et de la gestion de l'information, il est connu également sous le nom de MCB University Press et offre quelques 40 000 articles en texte intégral et des résumés (www.emeraldinsight.com).
Démocratiser l'accès à Internet
Une des particularités du Royaume-Uni est de posséder trois bibliothèques nationales (The British Library ; the National Library of Scotland ; the National Library of Wales) et un réseau très dense de bibliothèques avec 4600 bibliothèques publiques, 150 bibliothèques universitaires et de recherche et plus de 10 000 centres de documentation dans le secteur privé. Selon les dernières statistiques éditées par le British Council (www.britishcouncil.org), 480 millions d'ouvrages sont empruntés chaque année. Non content de ces chiffres, le gouvernement britannique a lancé le projet People's Network (www.peoplesnetwork.gov.uk) afin de démocratiser l'accès à Internet d'ici à 2005 : la majorité des bibliothèques sont impliquées dans ce projet et forment toutes les catégories de la population britannique à l'utilisation des ressources électroniques. En avril 2002 fut créé CILIP (Chartered Institute of Library and Information Professionnals), unifiant les associations de bibliothécaires et de documentalistes existantes : 23 000 professionnels sont actuellement recensés et forment la plus importante association professionnelle (www.cilip.org.uk).
La Déclaration de Glasgow sur les bibliothèques, les services d'information et la liberté intellectuelle
Droit fondamental
Pour son 75ème anniversaire, l'IFLA a voté à l'unanimité des membres présents lors de sa première Assemblée générale à Glasgow le droit fondamental de chacun à avoir accès à l'information et à pouvoir la diffuser sans restriction aucune. Elle suit ainsi la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies et affirme que, partout dans le monde, le respect de la liberté intellectuelle est pour les bibliothèques et les professions de l'information un devoir absolu, explicite dans les codes de déontologie, effectif dans la pratique (le texte complet de la Déclaration de Glasgow est sur le site de l'IFLA : www.ifla.org, hébergé dorénavant par l'INIST).
Un des constats à tirer de l'édition 2002 de l'IFLA est la prise en compte par la fédération du contexte international représenté par la mondialisation de l'économie : partagée entre le souci de reconnaissance professionnelle et celui du principe de service public, et malgré les pressions subies, notamment de la part des éditeurs, l'IFLA réaffirme avec plus de force chaque année des principes fondamentaux qu'il est bon de rappeler. Ces principes, la liberté d'expression, l'accès à la culture, sont régulièrement remis en cause dans certaines parties du monde et parfois même en Europe. Attentive aux changements, prenant position lorsque des problèmes surgissent et qui touchent à nos professions (idée de la création d'un fonds spécial d'aide aux bibliothèques victimes d'intempéries ou de destruction ; appel aux gouvernements lorsque des bibliothécaires sont soumis à des pressions politiques...), il n'y a que très peu de champs dans lesquels la fédération ne fait pas écouter se voix. Elle semble entendue, et notamment par les jeunes professionnels qui assistent de plus en plus nombreux chaque année à la Conférence annuelle.
L'an prochain, la 69ème conférence annuelle de l'IFLA se tiendra du 1er au 9 août dans un autre lieu symbolique, la ville de Berlin. Kay Kaseroka de l'Université du Botswana, première présidente élue de l'IFLA issue du continent africain, succèdera à l'actuelle présidente française, Christine Deschamps, et accueillera les congressistes avec le thème suivant : La bibliothèque, point d'accès à l'information et à la culture.
Archimag, 2002, n° 158, pp. 36-38.
La principale fédération d'associations des bibliothèques et des professionnels de l'information a célébré dans l'enthousiasme à la fin du mois d'août dernier son 75ème anniversaire. L'occasion choisie pour cette célébration fut la 68ème conférence annuelle tenue à Glasgow avec un intitulé plus que jamais d'actualité : Bibliothèques pour la vie : démocratie, diversité, délivrance d'information. L'assistance nombreuse (plus de 4700 participants et 125 pays représentés) démontre à l'envi le dynamisme de la fédération, qui est l'instance officielle représentative des professionnels de l'information au plan international. Des initiatives de coopération, des motions pour l'accès à l'information, des prises de position par rapport à la démocratie et à la liberté sont engagées, et même si la fédération se défend de jouer un rôle politique, sa voix est plus que jamais primordiale dans le paysage de l'information actuel.
Un peu d'histoire...
C'est en 1926 que Gabriel Henriot, président de l'Association des bibliothécaires français (ABF), lance un appel pour la création d'une instance internationale représentant de manière permanente les associations nationales de bibliothèques. Cette idée se matérialise à Edimbourg le 30 septembre de cette même année et 15 pays sont signataires. L'IFLA prend sa forme officielle en 1927. L'Europe et les Etats-Unis sont majoritairement représentés et ce, durant plusieurs décennies. L'IFLA est le point de rencontre d'une profession et la notion de " IFLA Family " prend forme et perdure jusqu'à maintenant. Ses trois champs d'action sont principalement les standards bibliographiques, le prêt entre bibliothèques et les échanges, la formation des professionnels. C'est surtout après la Deuxième guerre mondiale que la fédération se développe jusqu'à connaître l'expansion que nous lui connaissons actuellement. Son rôle s'est affirmé, sa présence étendue à plus d'une centaine de pays, le dernier en date étant la Corée du Nord. Son action se porte dorénavant sur la représentation des professions des bibliothécaires, un équilibre Nord-Sud mieux respecté, sur la discussion avec des partenaires incontournables tels les éditeurs ou les archivistes. Elle s'intéresse de près au droit de l'information (un comité a été spécialement créé), à la liberté d'expression, à la reconstruction des bibliothèques en péril (une motion fut votée en ce sens à Glasgow).
Accueillie avec un humour très "scottish " par le lord-maire de Glasgow (" Glasgow est la ville où l'on mange la meilleure cuisine...indienne de tout le Royaume-Uni !!" a-t-il lancé lors de la cérémonie d'ouverture), et par Christine Deschamps actuelle présidente de l'IFLA (" nous sommes dans un pays où McIntoch n'est pas le nom d'une marque d'ordinateur, mais est celui d'un architecte célèbre, Charles Rennie Mackintosh ! "), les congressistes répondirent présents aux nombreuses manifestations d'ordre social et culturel offertes. Des écrivains de renom international représentant la littérature britannique donnèrent des conférences et des lectures en public : outre le poète Eddwin Morgan, le romancier Jim Grace ou Anne Fine surtout connue en tant qu'auteur de littérature jeunesse, un des points d'orgue fut la présence chaleureuse et vivifiante du prix Nobel de littérature 1995, Seamus Heaney, qui lut nombre de ses poèmes inspirés par son enfance, sa mère et un imaginaire relevant du merveilleux devant un auditoire attentif et admiratif.
Présence des éditeurs
La présence des principales maisons d'édition internationales est un des attraits du congrès. La conférence donnée par Derk J. Haan, membre du conseil d'administration de Reed Elsevier et président d'Elsevier Science, fut particulièrement suivie : outre le poids prépondérant de cet éditeur
à l'heure actuelle, DJ Haan aborda les enjeux et les résultats du passage des périodiques imprimés aux publications électroniques, en particulier les questions de l'évolution des contenus éditoriaux, de la fonctionnalité des systèmes et des modèles économiques. A terme, l'ensemble des publications électroniques d'Elsevier devraient être archivées et accessibles : un accord sur la conservation numérique vient d'être signé avec la Bibliothèque nationale des Pays-Bas qui devient le premier organisme officiel de dépôt et de conservation des périodiques édités par Elsevier Science, soit 1500 titres de périodiques. Cette question est particulièrement sensible depuis plusieurs années pour les bibliothèques et les éditeurs : l'IFLA travaille sur ce sujet depuis deux ans avec l'Association internationale des éditeurs (IPA).
L'éditeur de périodiques électroniques Emerald a signé des accords importants de diffusion de ses collections, notamment avec de grands consortiums de bibliothèques. Spécialisé dans les domaines du marketing, du management, des ressources humaines et de la gestion de l'information, il est connu également sous le nom de MCB University Press et offre quelques 40 000 articles en texte intégral et des résumés (www.emeraldinsight.com).
Démocratiser l'accès à Internet
Une des particularités du Royaume-Uni est de posséder trois bibliothèques nationales (The British Library ; the National Library of Scotland ; the National Library of Wales) et un réseau très dense de bibliothèques avec 4600 bibliothèques publiques, 150 bibliothèques universitaires et de recherche et plus de 10 000 centres de documentation dans le secteur privé. Selon les dernières statistiques éditées par le British Council (www.britishcouncil.org), 480 millions d'ouvrages sont empruntés chaque année. Non content de ces chiffres, le gouvernement britannique a lancé le projet People's Network (www.peoplesnetwork.gov.uk) afin de démocratiser l'accès à Internet d'ici à 2005 : la majorité des bibliothèques sont impliquées dans ce projet et forment toutes les catégories de la population britannique à l'utilisation des ressources électroniques. En avril 2002 fut créé CILIP (Chartered Institute of Library and Information Professionnals), unifiant les associations de bibliothécaires et de documentalistes existantes : 23 000 professionnels sont actuellement recensés et forment la plus importante association professionnelle (www.cilip.org.uk).
La Déclaration de Glasgow sur les bibliothèques, les services d'information et la liberté intellectuelle
Droit fondamental
Pour son 75ème anniversaire, l'IFLA a voté à l'unanimité des membres présents lors de sa première Assemblée générale à Glasgow le droit fondamental de chacun à avoir accès à l'information et à pouvoir la diffuser sans restriction aucune. Elle suit ainsi la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies et affirme que, partout dans le monde, le respect de la liberté intellectuelle est pour les bibliothèques et les professions de l'information un devoir absolu, explicite dans les codes de déontologie, effectif dans la pratique (le texte complet de la Déclaration de Glasgow est sur le site de l'IFLA : www.ifla.org, hébergé dorénavant par l'INIST).
Un des constats à tirer de l'édition 2002 de l'IFLA est la prise en compte par la fédération du contexte international représenté par la mondialisation de l'économie : partagée entre le souci de reconnaissance professionnelle et celui du principe de service public, et malgré les pressions subies, notamment de la part des éditeurs, l'IFLA réaffirme avec plus de force chaque année des principes fondamentaux qu'il est bon de rappeler. Ces principes, la liberté d'expression, l'accès à la culture, sont régulièrement remis en cause dans certaines parties du monde et parfois même en Europe. Attentive aux changements, prenant position lorsque des problèmes surgissent et qui touchent à nos professions (idée de la création d'un fonds spécial d'aide aux bibliothèques victimes d'intempéries ou de destruction ; appel aux gouvernements lorsque des bibliothécaires sont soumis à des pressions politiques...), il n'y a que très peu de champs dans lesquels la fédération ne fait pas écouter se voix. Elle semble entendue, et notamment par les jeunes professionnels qui assistent de plus en plus nombreux chaque année à la Conférence annuelle.
L'an prochain, la 69ème conférence annuelle de l'IFLA se tiendra du 1er au 9 août dans un autre lieu symbolique, la ville de Berlin. Kay Kaseroka de l'Université du Botswana, première présidente élue de l'IFLA issue du continent africain, succèdera à l'actuelle présidente française, Christine Deschamps, et accueillera les congressistes avec le thème suivant : La bibliothèque, point d'accès à l'information et à la culture.
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