Les études de cas
(1992) - L'histoire hospitalière d'Argenteuil
Vivre en Val d'Oise, 1992, 13, avril-mai, pp. 55-61. (ce texte a fait l'objet d'une réactualisation et de corrections en décembre 2012. C'est la dernière version qui est présentée ici).
« La fabuleuse histoire de l'hôpital d'Argenteuil »
Conférence présentée le 11 décembre 2012
Sous l'égide des Archives municipales d'Argenteuil
Préambule
Entre 1989 et 1996 - période durant laquelle je suis recruté en tant que documentaliste et responsable du nouveau centre de documentation pluridisciplinaire de l'hôpital - le Centre hospitalier Victor Dupouy à Argenteuil (95) met en œuvre, outre la rénovation de ses locaux, la construction du nouveau bloc Léonard de Vinci, inauguré en 1990. Une nouvelle ère s'instaure impulsée par une équipe de direction dynamique sortie fraichement de l'Ecole des cadres de santé de Rennes, sous la houlette du directeur de l'hôpital, M. Maurice Toullalan.
De formation littéraire, avec en poche un diplôme de bibliothécaire et une expérience de cinq années à la Bibliothèque municipale de Tours, je ne connais pas le milieu hospitalier et médical. Ma tâche essentielle est de rassembler la documentation utile (à la fois scientifique, médicale, paramédicale, juridique, administrative et technique) pour plus de 200 médecins, 800 infirmières et quelques centaines d'employés administratifs, et de procéder à l'informatisation. Cette documentation n'est pas ouverte aux patients de l'hôpital. Internet n'est pas encore là, et la documentation est essentiellement papier. Dès le début du centre de documentation, l'accès aux banques de données spécialisées est cependant possible, et les premiers cédéroms en médecine (principalement la banque de données Medline) font leur apparition. Le centre de documentation se voit attribuer un pavillon entier sur plus de 500 mètres carrés, répartis en zones thématiques, salle de conférences, salles de travail individuelles, salles d'archives pour les revues médicales et la collection complète du Journal officiel depuis les années 1950. Le Centre voisine le nouveau Département d'Information Médicale (DIM) dont la tâche est de simplifier l'accès au dossier médical du patient. Il est dirigé par le Docteur André Parent. Je travaille en étroite relation avec l'ensemble des cadres hospitaliers, et également les deux écoles paramédicales du CHA, l'école d'infirmières et celle d'aides-soignantes. Des cours de bibliographie et de recherche d'information sont organisés pour les internes en médecine, les élèves infirmières et aides-soignantes.
L'Economat de l'hôpital prend alors pour habitude de déposer au Centre de documentation des objets, illustrations et documents anciens témoignant des différentes évolutions de l'hôpital durant plusieurs siècles. Une pièce spéciale équipée de vitrines est alors dédiée au « musée » de l'hôpital. Je commence à inventorier les faits marquants de cette histoire et découvre sa richesse et son antériorité, notamment avec un document précieux signé par Louis XIV dans des lettres patentes instaurant l'hôpital d'Argenteuil en 1694, document dorénavant déposé aux Archives municipales d'Argenteuil. Plusieurs études et articles sont présents dans la littérature locale, notamment le bulletin du « Vieil Argenteuil ». La revue « Vivre en Val d'Oise » publiée par le département du Val d'Oise me demande alors un article sur la fabuleuse histoire de l'hôpital d'Argenteuil, article publié en 1992.
Voici donc revu et corrigé, cet article. Il prend en compte l'historique de l'hôpital et ses évolutions jusqu'aux années 1990. Il est l'œuvre d'un documentaliste, bibliothécaire, et non pas d'un historien et d'un archiviste. La bibliographie consultée pour sa rédaction figure en fin d'article. Il peut cependant y avoir des erreurs ou des manques que tout lecteur peut être amené à mentionner à son auteur.
Par cet article, je souhaite vivement rendre hommage au Centre hospitalier Victor Dupouy d'Argenteuil, dont la direction de l'époque et l'ensemble du personnel m'ont apporté leur entière confiance, et où j'ai pu mettre en place et développer un véritable outil documentaire et d'information à disposition de la communauté hospitalière, outil qui existe toujours. Ce fut aussi pour moi le début de ma carrière de documentaliste.
Introduction
Au fur et à mesure que se déploie l'histoire de l'hôpital d'Argenteuil, sous ses différentes formes et évolutions, le lecteur remarquera l'intrication étroite hôpital-ville qui existe avec le développement du bourg, puis de la bourgade et de la ville d'Argenteuil elle-même. Cette intrication hôpital-ville est assez rare pour être mentionnée, il n'y a pas ou peu d'exemples similaires autour de Paris, mais plutôt en province, comme les célèbres Hospices de Beaune.
Ce sont bien sûr les différentes confréries religieuses qui s'établirent sur son sol, et également le renom de la relique de la Sainte Tunique du Christ qui font du lieu Argenteuil, un lieu attractif : c'est un lieu de pèlerinage reconnu. Les confréries sont les seules à offrir l'hospitalité aux pauvres et aux passants, à les accueillir et à les soigner. Il n'y a pas d'autres structures de soin et de santé dans le royaume de France, et bien évidemment pas de personnels de santé. La religion catholique qui prédomine associe étroitement la charité et l'assistance à autrui, rendant évident le soin apporté aux pauvres et aux indigents. Ce sont majoritairement des femmes, des sœurs, qui donnent les soins. Cette tradition perdure durant plusieurs siècles : il faut attendre les années 1960 et la la laïcisation du monde hospitalier pour les voir se retirer des hôpitaux publics.
Ainsi, entre le XIIIème-XIVème siècle, le bourg d'Argenteuil s'agrandit autour du Prieuré d'Argenteuil. On dénombre 400 et 500 habitants vers 1250, dont la moitié est décimée pendant la Peste noire en 1343. Durant la "Guerre de Cent ans", si funeste dans le Vexin en entrainant pillages, ravages et destructions, les Argenteuillais souhaitent ceinturer leur localité de murailles. François 1er les y autorise le 21 janvier 1544 : les derniers vestiges des murailles sont encore visibles boulevard Karl-Marx ; la Tour Billy, qui subsiste toujours rue du Lieutenant Colonel Prudhon, fut un élément avancé de la défense d'Argenteuil. C'est dans ces circonstances que s'établit à Argenteuil une "maison de secours".
L'Hôpital d'Argenteuil dans l'histoire : quelques dates-clés
- IIème siècle après JC, établissement d'une tribu gauloise, puis au temps des Romains, la ville prend le nom d'Argentoïalum.
- VIIème siècle après JC : création d'un premier établissement religieux de femmes par un riche parisien, Ermanric, et sa femme Numane. Une charte de Childebert III confirme la fondation.
- entre l'an 800 et l'an 1200, dépôt de la Sainte Tunique du Christ au Prieuré d'Argenteuil.
- 1351 : la Maison-Dieu d'Argenteuil est mentionnée dans un écrit et l'Abbé Lebeuf fait remonter l'histoire de l'hôpital à cette date.
- 1634 : Saint Vincent de Paul crée la Confrérie de la Charité d'Argenteuil, tenue par des dames d'Argenteuil.
- 1674 : René Coiffier, Aumonier du Roi, fait don de sa maison sur les bords de Seine. Celle-ci devient l'Hôtel Dieu.
- 1694 : Louis XIV reconnaît l'existence de l'hôpital d'Argenteuil dans ses lettres patentes.
- XVIIIème siècle : l'hôpital perd ses sources de revenus avec la Révolution, et réduit ses prestations.
- 1826 : les Sœurs Hospitalières de la Trinité de Chartres investissent l'hôpital.
- 1840-1870 : l'hôpital est réorganisé et se modernise.
- 1930 : un nouvel hôpital pavillonnaire est construit sur le plateau du Perreux. Il bénéficie du confort moderne de l'époque, notamment l'électricité.
- 1953 : 1ère promotion d'infirmières formées à Argenteuil.
- 1956 : création de la fonction d'aide-soignante.
- 1957 : les sœurs quittent l'hôpital.
- 1975 : ouverture du pavillon des consultations et techniques médicales (CTM) Roger Viguié.
- 1990 : inauguration du nouveau bloc Léonard de Vinci.
Les origines de l'hôpital
Au XIIIème siècle, deux établissements accueillent les malades : la léproserie et maladrerie de Franconville, et à Argenteuil, la Maison-Dieu dirigée par l'ordre des Billettes, moines hospitaliers.
L'abbé Lebeuf, auteur de "l'Histoire du Diocèse de Paris", fait remonter l'histoire de l'hôpital d'Argenteuil à cette époque. En 1351, le livre d'un visiteur des léproseries mentionne l'existence de la Maison-Dieu.
La Maison-Dieu limite ses activités au logement des pauvres, des passants, des voyageurs et des pèlerins. Lors de l'épidémie de peste de 1619, la ville d'Argenteuil dut passer un contrat avec un chirurgien de Paris pour assurer les soins.
Du XVème au XVIIème siècle : l'extension du bourg d'Argenteuil
L'extension d'Argenteuil est particulièrement importante durant ces deux siècles. La vénération dont la Sainte Tunique est l'objet amène une foule de pèlerins du pays tout entier. Nombreux sont les souverains venus se recueillir devant la Sainte Tunique : Anne d'Autriche, Marie de Médicis, Richelieu...
La Maison-Dieu porte également le nom d'Hôpital des Pauvres Passants. En 1629, l'ordre des Billettes, près de disparaitre, cède les lieux aux Ermites Augustins Déchaussés de la Congrégation des Gaules. Les Augustins administrent l'hôpital (faisant également office d'hospice) jusqu'en 1672, date à laquelle le roi réunit tous les biens des ordres hospitaliers à l'ordre de Notre-Dame du Mont Carmel et de Saint Lazare. Les pauvres et les passants sont recueillis à l'Hôtel-Dieu, mais les Augustins demeurent dans leur couvent jusqu'à la Révolution.
La Maison-Dieu donnant des signes de décadence, le curé d'Argenteuil, Messire Blaise Pierre, adresse en 1634 une supplique à l'archevêque de Paris. Cette supplique a pour objet l'institution d'une confrérie de charité pour soigner les pauvres malades, "spirituellement et corporellement", est-il dit. Cette supplique, écrite sur un parchemin, était rédigée ainsi :
"A Monseigneur l'Illustrissime et Révérendissime Archevêque de Paris supplie humblement Messire Pierre (Blaise), prêtre, bachelier en droit canon, curé d'Argenteuil, disant qu'ayant su les grands biens qui arrivent de l'établissement de la Charité des pauvres malades aux lieux où elle est établie, désirerait la faire établir en la paroisse dudit Argenteuil, et de commettre maître Vincent de Paul pour former ledit établissement..."
Une telle institution semble, en effet, nécessaire, car la commune est alors considérée comme malsaine et sujette aux maladies endémiques, inhérentes à sa localisation près de la Seine.
Saint Vincent de Paul à Argenteuil
Le 24 août 1634, jour de la Saint Barthélémy, Vincent de Paul visite Argenteuil. Il fait entendre du haut de la chaire de l'église un vibrant appel : soixante-neuf dames s'enrôlent immédiatement. Un document autographe érige cette association de dames en Confrérie. Il fonde ainsi la Confrérie de la Charité d'Argenteuil.
Saint Vincent de Paul Né en 1576, près de Dax, il s'occupe des malades à Paris. Il devient aumônier de Marguerite de Valois en 1610, puis curé à Clichy en 1611. Dès lors, il commence ses missions d'apostolat et de charité auprès des pauvres des campagnes. En 1617, il organise la première Confrérie de la Charité et multiplie les institutions charitables dans toute la France : des missions spéciales données par les prêtres de la Congrégation des Missions ont pour but de réchauffer le zèle des membres des diverses confréries. Il meurt en 1660. |
La Confrérie de la Charité d'Argenteuil
Une nouvelle Maison-Dieu est bâtie sur les bords de la Seine, 7 rue des Charrons.
L'administration
La première supérieure de la Charité d'Argenteuil est Louise Imard, femme de Jean Dubois, marchand drapier ; avec pour trésorière, Anne Feron, femme de Macé, marchand boucher.
La maison est administrée par les dames de la Confrérie de la Charité jusqu'en 1699. Le 24 février 1669, Tholard, directeur d'une mission à Argenteuil, fait part d'une délibération où il est décidé que les secours ne se donneront plus en argent ma
s en vivres et en médicaments. Le règlement de la Charité d'Argenteuil peut être considéré comme un exemple.
Les revenus
Les principaux revenus viennent de la charité publique, stimulée par Saint Vincent de Paul, puis par Bossuet, locataire du château du Marais, et plus tard par l'abbé Fleury, resté dix huit ans possesseur du Prieuré d'Argenteuil. C'est toujours le 25 août après les vêpres, et en grande solennité que se rendaient les comptes. Ces quêtes doivent être fructueuses, car la bourgeoisie de Paris, le Parlement, la haute noblesse possèdent à Argenteuil, sur les bords de la Seine, de ravissantes villas. Argenteuil dans l'ensemble n'est pas une cité malheureuse ; la culture y est prospère, ses vins et son industrie plâtrière renommés. Les dons affluent et la Confrérie, véritable bureau de bienfaisance, nourrit les malades, mais aussi les malheureux se trouvant dans l'impossibilité de travailler.
De 1635 à 1653, la Confrérie résiste à la tourmente des guerres et de la Fronde. Argenteuil, la seule ville close de ce côté de la Seine entre Saint-Denis et Poissy voit affluer dans ses murs une multitude de gens chassés de chez eux par les évènements.
1674 et 1694 : des années marquantes
En 1674, René Coiffier, seigneur de Rocquemont, conseiller au Parlement de Paris, Aumônier du Roi, lègue son hôtel à la Confrérie de la Charité. Cette maison domine la Seine et possède une belle situation. Elle est alors désignée sous le nom d'Hôtel-Dieu, à l'emplacement actuel du Musée d'Argenteuil.
Les biens des hôpitaux, des maladreries et léproseries du Royaume ont été remis en 1678 aux ordres du Mont Carmel de Saint Lazare. Plusieurs années après, en 1694, Louis XIV, par des lettres patentes, autorise l'existence de l'hôpital à Argenteuil ; les biens des maladreries de Saint-Leu, Cormeilles et Franconville sont réunis à la Confrérie d'Argenteuil. Par cette régularisation, l'Hôtel-Dieu d'Argenteuil devient un établissement hospitalier de premier ordre dans la région.
Le XVIIIème siècle : la Révolution
Le début du XVIIIème siècle est marqué par des dons importants en terres, maisons et argent, ainsi que par les travaux d'aménagement de la maison donnée par René Coiffier. Deux grandes salles sont aménagées ainsi que la chapelle.
Avec la Révolution, l'hôpital perd par les spoliations et la dépréciation de la monnaie une grande partie de ses revenus. A la fin de ce siècle, les revenus se réduisent ou disparaissent ; les débiteurs ne veulent plus payer. Le gouvernement est en liquidation avec ses créanciers au nombre desquels se trouvaient les établissements religieux supprimés. Les finances de l'hôpital sont désorganisées et pour remédier à cette situation, la Ville établit pendant deux ans un octroi sur les vins.
Le XIXème siècle
Argenteuil n'est, à cette époque-là, reliée à Paris que par un bac qui permet de franchir la Seine jusqu'à Colombes. Le premier pont routier sera construit vers 1830, avec un poste de péage. Simultanément, la population s'accroît (4534 habitants en 1831) et le chemin de fer traversera bientôt la Seine: l'industrialisation est en marche.
Jusqu'en 1826, il est décidé, pour rétablir les finances, de ne plus recevoir de malades et de vieillards que dans une salle sur deux de l'Hôtel-Dieu. Cela permet ainsi une économie de 1000 francs par an.
Le 15 avril 1826, la Commission administrative de l'Hôtel-Dieu accorde à Madame Oshee, la dernière économe civile ayant rempli gratuitement cette fonction pendant 18 ans, une retraite de 150 Frs par mois. Elle fait place aux Sœurs Hospitalières de la Trinité de Chartres. Celles-ci s'y installent le 18 avril. La première supérieure est Marguerite Bréant.
En 1840, l'Hospice des Vieillards passe un traité avec l'Hôpital qui courra jusqu'en 1872. Des dons conséquents permettent de rajeunir les bâtiments. Les Services Généraux sont complètement réorganisés et la transformation du pavillon des hommes (le Pavillon Chevreuil), est envisagée. Le chiffre des hospitalisés passe alors de 80 à 118.
Les bâtiments de l'ancien hôpital sont transformés en annexe pour les hommes âgés et quelques chambres à deux lits sont créées pour les couples. 60 personnes supplémentaires peuvent ainsi être logées, ce qui porte à 178 le nombre de personnes hébergées à l'hôpital.
Ainsi l'hôpital dont on mentionne l'existence dès le XIIIème siècle sous l'appellation de "Maison-Dieu", créé par Saint Vincent de Paul en 1634, installé en 1674 dans la propriété donnée par René Coiffier, et reconnu par Louis XIV dans ses lettres patentes, cet hôpital est désaffecté en 1929. Ces locaux anciens et exigus sont aujourd'hui occupés par le Musée du Vieil Argenteuil.
Le XXème siècle : le nouvel hôpital pavillonnaire
De nouveaux locaux voient le jour sur le plateau du Perreux, à l'emplacement actuel du Centre Hospitalier Victor Dupouy. Ce déménagement a été envisagé dès 1904 par le Conseil municipal. 40.000 mètres carrés de terrain sont donc achetés dans ce but. La guerre de 1914-1918 retarde cependant le projet de nouvel hôpital.
De 1925 à 1929, la construction de l'hôpital commence, sous l'administration de Mr Gautheron, maire d'Argenteuil, et de son premier adjoint, Mr Decoman. Ce dernier, devenu maire par la suite, inaugure les nouveaux locaux en 1930. C'est Mr Manel, architecte à Paris, qui se voit confier les travaux. L'hôpital nouveau commence à fonctionner au début de 1930, avec à sa tête les Sœurs de Saint-Paul de Chartres. Sœur Françoise, la supérieure à cette époque, reste trente années à l'hôpital.
Fait pour accueillir 300 malades, l'hôpital bénéficia des innovations techniques de l'époque : chauffage, éclairage, cuisine... Il est pavillonnaire, suivant en cela les idées de Pasteur, afin d'éviter les microbes et la contagion.
Au temps des religieuses, dans les années cinquante, on note une surcharge extraordinaire des locaux : par exemple, le rez-de-chaussée du pavillon Bretonneau accueille 52 malades. Seulement une sœur s'occupe d'eux. Chaque matin, elle pose 48 perfusions.
L'hôpital est alors perdu dans la campagne ; il est verdoyant, fleuri et d'une superficie minuscule comparé à l'hôpital actuel. Les jardins sont si bien entretenus, qu'ils constituent un lieu de promenade pour le dimanche des Argenteuillais.
En 1953, sort la première promotion d'infirmières formées à Argenteuil et 1956 voit la création de la fonction d'aide-soignante. En 1957, la communauté religieuse composée de 25 sœurs quitte l'hôpital. Une messe d'adieu à la basilique Saint-Denis d'Argenteuil est donnée.
Une page de l'histoire hospitalière est ainsi tournée : nous rentrons dans l'ère du professionnalisme et de la technicité. La profession d'infirmière s'est, en effet, constituée dans les années 1960 (il y eut à cette époque un débat sur le port du voile, sur les jambes nues, sur les chaussures !!). Les infirmières se spécialisent de plus en plus.
Les années 1960 voient se dérouler les évènements de la Guerre d'Algérie : pour éviter les règlements de compte entre les courants nationalistes algériens, l'hôpital de St Germain-en-Laye accueille les militants du FLN et celui d'Argenteuil soigne ceux du MNA. Le premier bloc d'Urgences ouvre en 1965, suivi par la nouvelle Maison de Retraite qui déménage de ses locaux situés à la sous préfecture.
L'année 1978 voit l'ouverture du bâtiment du CTM (Consultations et techniques médicales) désigné par le nom de Roger Viguié : ce médecin-chef du service de médecine fut président de la Commission Médicale Consultative. Son renom contribua à la reconnaissance de l'hôpital d'Argenteuil.
L'architecture a également beaucoup évolué : la structure était autrefois tournée vers l'intérieur, comme un cloître. Tout le monde entrait par le porche du bâtiment de l'Administration, rue Saint Vincent de Paul. Aux beaux jours, malades, infirmières, médecins se retrouvaient sur la place centrale. L'hospitalisation était plus longue et le lieu représentait un certain dépaysement. Maintenant, le Centre Hospitalier est devenu beaucoup plus ouvert sur l'extérieur, et les bâtiments s'intègrent dans le paysage urbain.
Le nouveau bloc médical Léonard de Vinci : une nouvelle ère
L'inauguration du nouveau bloc Léonard de Vinci en 1990 est le fruit de vingt années d'efforts. Presque tous les services médicaux ont quitté les anciens bâtiments en briques rouges construits en 1930 pour emménager dans le nouveau bloc médical. Mr Jean Seac'h est un des architectes en charge du projet : les volumes du bâtiment présentent des arêtes rectangulaires et le revêtement des façades est traité en carrelage blanc. Nul ne doute du bien fondé de la réalisation d'un tel projet : modernisme, techniques de pointe, meilleur accueil des usagers, conditions de travail améliorés pour le personnel hospitalier. Durant toute cette seconde moitié du siècle, la gestion de l'hôpital a évolué profondément : les équipes administratives se sont renforcées au fil des années. Un hôpital se gère comme une entreprise : l'hôpital d'Argenteuil est d'ailleurs la première entreprise de la ville.
En conclusion, l'histoire de l'hôpital d'Argenteuil apporte un éclairage nouveau sur la réalité d'aujourd'hui. En effet, les notions fondamentales de politiques hospitalières remontent loin dans le temps : le développement de techniques, l'évolution des mentalités ont laissé penser que tout était nouveau désormais. Or, rien n'est plus faux : la référence à l'histoire constitue en effet une aide précieuse à la décision. Les problèmes fondamentaux de l'hôpital demeurent, nous avons pu le voir au travers de ces huit siècles d'histoire : gérer l'hôpital, économiser, réduire les dépenses, trouver du personnel compétent. Ces problèmes furent de tout temps la préoccupation des gestionnaires. Rechercher dans le passé des leçons porteuses d'avenir, trouver des stratégies adaptées au monde particulier qu'est l'hôpital, cela fut de tout temps impératif.
Le Centre Hospitalier d'Argenteuil est donc l'héritier d'une structure ancienne, qui a su évoluer à travers presque huit siècles d'histoire et s'adapter aux flux et aux besoins des populations, aux guerres et à l'industrialisation croissante de la région. Il a suivi l'évolution technologique, acquérir un plateau technique performant et ainsi ne craint pas la concurrence.
Bibliographie
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Aubert, J. La Grande Histoire du Val d'Oise. Pontoise : Edijac, 1987.
Boucher, Louis Eugène. Monographie de l'instituteur d'Argenteuil. 1900
Chevalier, E. Notice sur l'Hospice d'Argenteuil. St-Denis : A. Moulin, 1859. pp. 185-203.
Commission Municipale d'Histoire locale. Argenteuil, Images d'histoire. Millau : Impr. Maury, 1977.
Girardin-Dingremont. Historique de l'Ancien et du Nouvel Hôpital. Le Vieil Argenteuil, bulletin n° 6.
Girardin-Dingremont. Le Livre d'or de l'hôpital et de l'hospice des vieillards. Ville d'Argenteuil.
Rochaix, Maurice. Richesse et modernité de l'histoire hospitalière. Notre Revue, 1991, août, p. 24-26
Remerciements
- Archives de la Mairie d'Argenteuil
- Bibliothèque Municipale d'Argenteuil, Parc de la Mairie d'Argenteuil
- Archives départementales du Val d'Oise
cop. JP Accart 2013
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