Analyses d'ouvrages
2004: L’Accès au savoir en ligne
par Jacques Perriault
Paris : Odile Jacob, 2002
266 p. – (Coll. Le champ médiologique).
ISBN 2-7381-1201- 3 : 22,50 euros
Jacques Perriault est professeur en sciences de l’information et de la communication à l’université de Paris X. Son dernier ouvrage paru en 2002 – mais gardant toute son actualité - traite de l’un de ses thèmes de prédilection, le savoir en ligne ou à distance. La clarté de sa réflexion au travers de ses divers écrits (J. Perriault a publié cinq ouvrages et diverses contributions, notamment un excellent texte sur la mémoire humaine et la mémoire numérique dans Les savoirs déroutés, ENSSIB, 2000) se retrouve dans le présent ouvrage : intelligence, mémoire et technologie entretiennent des rapports étroits.
L’introduction débute par cette phrase : « Comprendre le rôle des réseaux numériques dans l’accès au savoir, tel est le projet de ce livre ». Certaines notions vont nous être précisées : savoir et connaissance, savoir en ligne (vue comme une notion générique au même titre que la documentation ou la gestion des connaissances), modèles de connaissance, réseaux numériques. Le livre est étayé par une enquête sur l’offre d’Internet en matière d’accès au savoir.
Le premier chapitre « Une institution de l’Occident » fait appel au passé : aussi loin que remontent les origines de l’homme, l’inscription du savoir sur des supports a toujours été une préoccupation majeure. A l’écrit et l’audiovisuel, vecteurs essentiels de la diffusion du savoir, s’ajoutent maintenant les réseaux numériques. Internet est vu cependant comme un « générateur d’utopie » comme le furent d’autres découvertes technologiques ou scientifiques avant lui. L’adoption de formats d’échange de données est un passage obligé : leur apprentissage est un point important qui sera développé. L’universalité d’un tel dispositif technologique est également mise en avant, s’appuyant sur les télécommunications (par câbles, satellites, fibres optiques…). Le chapitre deux « Le savoir en ligne » examine les différentes composantes de l’offre de savoirs en ligne et notamment la diffusion grâce aux moteurs de recherche ou aux services de référence des bibliothèques. Avec les approches actuelles du knowledge management et des communautés de pratique, la médiation humaine et le rapport au collectif dans la transmission du savoir prennent une place prépondérante. Le chapitre trois « Formation à distance et universités virtuelles » dresse une chronologie (à partir des années 1985, mais surtout 1995) de la formation à distance et en ligne, en insistant sur les organismes qui ont développé ce type de programme, tels le CNED ou les instituts universitaires de technologie (avec le soutien du ministère de l’Education nationale) en France, mais également dans le monde à l’instar de quelque deux cents universités américaines. Administrations et entreprises privées sont d’autres acteurs de la formation à distance. A partir des années 2001-2002, il semble que la formation en ligne ait du mal à trouver son souffle.
Dans le chapitre quatre « Altérité, collectif et réciprocité », l’auteur montre l’évolution constante des « pratiques spontanées d’accès au savoir » : quelques exemples à partir d’entretiens individuels apportent un éclairage sur la manière dont un individu isolé peut apprendre à distance ou en ligne, pourquoi il a choisi ce type d’apprentissage, quels types de contact il peut lier avec d’autres individus placés dans la même situation. Ces exemples, très diversifiés, sont certainement un des atouts de cet ouvrage qui ne reste pas uniquement conceptuel, mais se veut également un miroir des pratiques actuelles. Ce chapitre démontre combien Internet a modifié les pratiques individuelles de formation, leur a permis de se développer par rapport à l’offre institutionnelle. Le chapitre cinq « Savoir-faire et compétences » souligne la complexité des compétences, à la fois techniques, cognitives et culturelles, nécessaires pour l’apprentissage à distance, sans oublier les facteurs temps et espace appréhendés différemment selon les individus et les technologies utilisées. Qu’en est-il des « politiques publiques » (chapitre six) ? Les politiques locales et régionales (France, Canada) ou gouvernementales (Etats-Unis, Italie, France) montrent l’importance des initiatives individuelles dans certains cas pour que les projets avancent (le cas du Futuroscope à Poitiers est intéressant en la matière). Les considérations économiques jouent un rôle non négligeable. L’auteur conclut par l’adoption de standards internationaux pour la formation en ligne dans le contexte de la mondialisation qui sont, selon lui, une avancée certaine.
Ouvrage dense, sa lecture est vivement conseillée : les responsables de formation et de ressources humaines, les concepteurs de systèmes d’apprentissage en ligne, mais également tous ceux qui réfléchissent à leur mise en place trouveront là matière à réflexion. Chaque chapitre peut être lu indépendamment et permet de se forger une opinion par rapport au monde encore incertain des réseaux, et à leur rôle dans l’éducation et la formation. Jean-Philippe Accart cop. 2005
Critique parue dans Critique parue dans Documentaliste, sciences de l'information, 2004, vol. 41, n° 4-5, pp. 288-289.
Cop. JP Accart, 2007
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