Analyses d'ouvrages
2005: La Société de l’information
Conseil d’analyse économique
Paris : La Documentation française, 2004
La troisième révolution industrielle se déroule sous nos yeux avec comme conséquence principale une société en pleine transformation sous l’impulsion des technologies de l’information. Cette société - dite société de l’information - voit comme changement majeur une informatisation qui touche chaque domaine de la vie socio-économique (que ce soit le travail, la maison, les loisirs, l’éducation…) et influe de plus en plus fortement sur la croissance économique.
L’information est devenue un bien économique qui s’achète et s’échange. Ce bien a donc un coût, surtout par rapport aux infrastructures nécessaires à sa production, son traitement et sa diffusion. Cependant la décentralisation du réseau Internet engendre certains paradoxes : des groupes ou des particuliers diffusent gratuitement des informations ou des produits telle la musique, avec comme épiphénomène l’éclosion exacerbée de la consommation individuelle. Cette gratuité apparente de certains biens informationnels aboutit à une confusion aux yeux du public. Mais la décentralisation favorise également concentrations et monopoles type Microsoft.
Dans le cadre de cette nouvelle économie, comment réagissent les producteurs d’information qu’ils soient publics ou privés ? Ils utilisent le plus souvent la législation sur le droit d’auteur pour se défendre, la presse se faisant l’écho régulier de procès en cours contre des particuliers ou des sociétés. Les auteurs de ce Rapport préconisent de nouvelles stratégies et alliances à mettre en place. Producteurs et consommateurs doivent trouver un terrain d’entente et mieux coopérer. Cette coopération peut s’exercer avec le « marché libre » où l’échange d’information est possible. Ainsi, « l’infomédiation » (synonyme d’intermédiation) se développe : commerciale parfois (les producteurs cherchant par exemple à obtenir l’avis des internautes sur leurs produits), elle est aussi informelle avec les échanges entre individus sur la Toile : espaces de discussion, chats, échanges de liens…
Les politiques publiques sont bien évidemment en pleine ligne de mire. Les auteurs pointent le retard français en matière de diffusion des technologies de l’information et d’accès à Internet. Retard rattrapé avec l’e-administration qui présente cependant un défaut d’articulation entre les niveaux national, régional et local. Mieux équiper les écoles, ouverture d’espaces numériques publics, offre intégrée d’accès à Internet pour les ménages modestes sont parmi les propositions faites par les auteurs.
Le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) vise à réduire la fracture numérique entre le Nord et le Sud. Le Sommet de Genève de décembre 2003 a permis la publication d’une Déclaration de principes et d’un Plan d’action qui seront évalués et revus au Sommet de Tunis en décembre 2005. Les acteurs de l’Internet sont multiples et diversifiés (société civile, ONG, gouvernements, entreprises…), leurs intérêts divergent souvent : pour une gouvernance mondiale, une « régulation multi-acteurs » s’impose donc.
A ce rapport officiel, s’ajoutent des commentaires par des spécialistes : en matière juridique, économique, fiscale, d’éducation, statistique, sécuritaire, sanitaire.
Très complet sur bien des points, ce rapport sur la société de l’information fait suite à de nombreux autres et une actualisation s’avérait nécessaire. Nul doute que d’autres rapports suivront tant la société de l’information évolue vite. Celui-ci a le mérite d’observer la situation actuelle avec une certaine lucidité, un recul salutaire par rapport aux questions qui se posent. Avoir fait appel à un certain nombre d’experts dans leurs domaines enrichit avec bonheur le propos des auteurs.
Critique parue dans le Critique parue dans Documentaliste, sciences de l'information, 2005, vol. 42, 4-5, pp. 315.
Cop. JP Accart, 2007
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