International
1999 - IFLA Bangkok (Thaïlande) (bis)
Bibliothèques et documentation en Thailande
Documentaliste, sciences de l'information, 2000, vol. 37, n° 1, pp. 49-53.
Des origines à nos jours
La Thaïlande a une tradition séculaire de conservation du patrimoine et du savoir: rochers et grottes gravés de peintures et dessins sont une des meilleures preuves de cette tradition poursuivie ensuite et accentuée par l'apparition de l'alphabet. Toutes sortes de matériaux sont alors employés comme support de l'écrit: la pierre, le métal, les feuilles de palmiers utilisés pour les manuscrits, le papier ainsi que les murs des habitations. Ce sont des sources uniques d'information sur l'histoire et la culture de ce pays fortement influencé par ses grands voisins, la Chine et l'Inde. Les premières bibliothèques construites au XIVème siècle sous le règne du roi Sukhothai ont permis de rassembler des témoignages essentiels sur l'apparition et le développement du boudhisme dans cette région du monde, le droit ou l'astrologie. La Bibliothèque nationale de Thaïlande (The Vajirayana Library) est construite en 1905 et le roi Rama III encourage l'accès aux collections : le célèbre temple Wat Po à Bangkok se voit ornementé de murs sur lesquels sont inscrits les préceptes de la religion, des traités de médecine, ainsi que des rites issus des différentes populations qui composent la Thaïlande. C'est une bibliothèque unique, the Buddhist Scriptures Library, qui introduit le concept d'une bibliothèque où les écrits essentiels sont gravés dans la pierre. Le peuple thaïlandais, très religieux, a ainsi accès au contenu des textes des manuscrits de la Bibliothèque nationale lorsqu'il vient faire ses dévotions à Boudha. Cette volonté de diffusion du savoir est présente jusqu'à nos jours: les moyens modernes de l'imprimerie sont utilisés et le dépôt légal est institué. Avec Internet, la Thaïlande, un des "dragons" asiatiques, a su s'adapter aux enjeux de la société de l'information.
En outre, de nombreux échanges avec les pays occidentaux (la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Danemark) permettent l'adoption des règles internationales en matière bibliographique, ainsi que la formation des personnels des bibliothèques, notamment ceux de la première bibliothèque universitaire du pays, The Chulalongkorn University Library. Quatorze universités forment des professionnels au niveau initial, et neuf ont mis en place un diplôme de maîtrise. La formation continue est assurée par l'Association nationale thaïlandaise des bibliothèques. Cette dernière est également à l'origine du Système d'information national thaïlandais, THAI NATIS.
Le Système d'information national thaïlandais, THAI NATIS
THAI NATIS est issu d'un accord avec l'UNESCO datant de 1974 mais qui prit véritablement effet à partir de 1986: l'objectif premier de ce programme est de mettre en place un système national d'information en vue d'accroître l'efficacité des bibliothèques, de coordonner leur action et d'aider le pays pour ses besoins en information. Des centres de coordination sont créés par grands domaines: l'agriculture, la médecine, les sciences humaines, les sciences et techniques, l'économie.
Ils collectent des données afin de répondre aux besoins des institutions gouvernementales et scientifiques ; ils répertorient les sources d'information nationales et internationales afin de mieux orienter les utilisateurs. La Bibliothèque nationale, où siège le secrétariat de NATIS, dessert ainsi la population pour ses demandes d'information, édite des index de périodiques, diffuse les documents et participe aux bases de données de NATIS. Des séminaires sont régulièrement organisés afin de promouvoir cette action.
La documentation spécialisée en Thaïlande
Le développement de la documentation spécialisée en Thaïlande est réel à partir de 1940. A compter de cette date, les organismes officiels et privés prennent conscience de l'importance de cette documentation et des bibliothèques spécialisées sont mises en place dans des domaines divers: l'information officielle et administrative ; l'entreprise ; la banque et la finance ; la recherche ; les organisations internationales. D'autres champs sont ensuite investis tels la médecine, les transports, l'armée, la démographie etc. Ces centres de documentation adoptent très vite les nouvelles technologies, éditent des rapports, et construisent des bases de données. Leur politique documentaire se fonde sur un service de qualité optimale pour l'utilisateur. Les métiers traditionnels des bibliothèques évoluent comme dans d'autres parties du monde vers plus de technicité et sont plus proches du documentaliste actuel que nous connaissons, connecté et branché sur les réseaux de l'information.
En guise de conclusion, le bilan ainsi dressé apparaît et est positif en comparaison d'autres pays d'Asie du Sud-Est. Il faut cependant apporter quelques précisions à cette situation, précisions données par les professionnels thaïlandais eux-mêmes. Il reste un effort important à réaliser en vue de la formation (initiale et continue) des personnels concernés. Des grandes villes, comme Bangkok, concentrent la majeure partie des ressources documentaires au détriment d'autres régions du pays, plus défavorisées: le programme THAI NATIS est une réponse à cette situation. La crise économique récente a frappé de plein fouet les bibliothèques et centres de documentation qui se sont alors tournés, comme leurs collègues étrangers, vers les possibilités offertes par les échanges et les réseaux de l'information. Une grande partie de la population, trop pauvre, n'a pas accès à la culture. Ces points sont importants et apportent des nuances à ce qui a été exposé précédemment. Il faut souligner cependant la prise de conscience des pouvoirs publics par rapport à cet état de fait et les efforts réalisés par la monarchie actuelle, attentive aux demandes et qui se situe, par son action, dans la ligne tracée par les précédents souverains du royaume de Thaïlande.
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