Les utilisateurs

(1994) - L'enseignement de la documentation en médecine.

Bulletin des bibliothèques de France, 1994, t. 39, n° 4, pp. 111-112.

Une typologie des différents professionnels de santé intéressés par la documentation se dessine très nettement avec le développement actuel des besoins en documentation médicale et en soins infirmiers et de son enseignement. Ecoles de bibliothécaires, facultés de médecine françaises et francophones, instituts de formation en soins infirmiers (destinés à former les infirmier(e)s), écoles de cadres infirmiers, formation continue des médecins, sont des demandeurs potentiels pour cet enseignement.

Les documentalistes

Les Ecoles de bibliothécaires

Il est révélateur de constater que certaines écoles de bibliothécaires (en l'occurrence, l'ENSSIB, l'INFB, Médiadix ou l'Ecole de Bibliothécaires-Documentalistes (EBD) de l'Institut Catholique de Paris, par exemple) accordent, dans leur programme, une place non négligeable à l'enseignement de la bibliographie médicale et scientifique, ainsi qu'à l'interrogation des banques de données spécialisées telles Medline, PASCAL, SCISearch. Cet enseignement est, en fait, destiné à des étudiants susceptibles de travailler en bibliothèque médicale ou en documentation pharmaceutique ; de nombreux débouchés sont offerts dans cette branche spécialisée. L'enseignement est dispensé sous la forme d'une liste d'ouvrages de base : une méthodologie de recherche bibliographique en médecine et en sciences est développée avec, à l'appui, des séances de travaux pratiques portant sur les outils papiers (type Index Medicus, Current Contents, Science Citation Index) et l'interrogation en ligne des banques de données correspondantes.

Les bibliothécaires francophones

Un certain nombre d'organismes institutionnels, tels le Centre International de l'Enfance, la Conférence Internationale des Doyens des Facultés de Médecine d'Expression Française, délivrent des stages de formation pour des bibliothécaires francophones travaillant dans le domaine de la santé. Ces stages, d'une durée de 15 jours à un mois, accueillent une vingtaine de bibliothécaires et permettent des échanges fructueux entre formateurs et "formés", bien que les niveaux d'études, les expériences professionnelles, les représentations linguistiques (Afrique Noire, Maghreb, Asie, Europe de l'Est, Caraïbes) soient pour le moins différentes. Les besoins en documentation médicale sont à la fois très pratiques (comment se procurer des ouvrages médicaux, comment s'abonner à des revues scientifiques, qu'est-ce-qu'un réseau etc...?) et très générales (la gestion d'une bibliothèque, son informatisation). L'intérêt pour les nouvelles technologies est cependant très fort, en mettant bien entendu l'accent sur les avantages du CDROM et des banques de données destinées à ces pays, la plupart en voie de développement (BIRD, PASCAL, MEDIDOC REDOSI, EXTRAMED, etc...).

Les bibliothécaires européens de santé

Tous les deux ans, ou au cours de congrès et séminaires internationaux (Section des Sciences Biologiques et Médicales de l'IFLA), la jeune et dynamique Assocation Européenne pour l'Information et les Bibliothèques de Santé (AEIBS-Bruxelles) , créée en 1986 sous l'égide de l'Organisation Mondiale de la Santé, propose à ses membres (quelques 700 bibliothécaires de 23 pays différents), des cours de formation continue en français et en anglais dans le domaine de l'information biomédicale. Très suivis, ces cours permettent à ces professionnels de l'information de santé d'être au courant des derniers développements de la technologie (CDROM et banques de données) et de la bibliothéconomie (gestion, personnel). De plus en plus, mais c'est aussi vrai dans les autres domaines de la documentation, l'attention se porte sur le rôle futur du bibliothécaire, le concept de "bibliothèque virtuelle" et sur les nouveaux réseaux de la communication scientifique type Internet.

En ce qui concerne la formation continue, il existe à l'heure actuelle, peu de formations organisées sauf celle de l'IMA-INSERM sur Medline et PASCAL, et celle des URFIST.

Les médecins

Les étudiants en médecine

Outre le fait que certaines facultés de médecine (Nancy, Lyon par exemple) dispensent aux étudiants des cours en documentation, les étudiants en médecine, afin de parfaire un enseignement magistral de plusieurs années, effectuent des stages dans les hôpitaux et font fonction d'internes. Ils participent ainsi de façon étroite à la vie des services médicaux. Les staffs de bibliographie déjà nommés précédemment, l'étude de cas médicaux et, finalement la constitution de leur bibliographie pour la thèse de doctorat sont autant de raisons pour les amener à utiliser la bibliographie médicale. Les bibliothécaires médicaux organisent des cours de bibliographie, qui sont à la fois l'apprentissage d'une méthodologie de la recherche bibliographique, et une approche des possibilités offertes par les banques de données, et ce, quel que soit leur support. C'est aussi, pour ces futurs praticiens, une manière de les amener à compléter et à faire évoluer efficacement, par la lecture, des connaissances théoriques.

Le corps médical

Le corps médical, et les médecins hospitaliers en particulier, ont pour obligation de mettre à jour de façon constante leurs connaissances scientifiques afin d'assurer des soins de qualité : c'est vrai de par la nature même d'un enseignement qui doit être réactualisé, par le fait que les découvertes scientifiques et médicales se périment au bout de cinq années en moyenne ; et également qu'un médecin, s'il veut évoluer dans sa carrière, se doit d'écrire un certain nombre d'articles scientifiques, et si possible, dans des revues internationales indexées dans les banques de données médicales (type Medline par exemple).

La formation continue des médecins empreinte donc plusieurs chemins :

  • la lecture régulière de la presse spécialisée, soit par abonnement personnel ou grâce à la fréquentation d'une bibliothèque (dans les centres hospitaliers universitaires, les centres hospitaliers généraux, les facultés de médecine, les laboratoires de recherche) : cette lecture s'avère cependant de plus en plus difficile de par l'abondance des publications (20 000 journaux biomédicaux et 17 000 nouveaux ouvrages publiés annuellement). Les staffs de bibliographie sont, en général, un bon exercice pour le maintien des connaissances dans un domaine particulier au sein d'un service hospitalier par exemple ; de nombreux médecins réalisent également des synthèses bibliographiques pour une revue ou le bulletin bibliographique d'un laboratoire pharmaceutique (dans ce cas, c'est, pour eux, une voie d'accès aux centres de documentation de l'industrie pharmaceutique)
  • la participation à des congrès médicaux : on ne dira jamais assez l'importance des échanges personnels au cours de ces congrès, une ou deux fois par an. Il existe, en général, des congrès pour chaque spécialité.
  • enfin, des cours de formation continue dans les facultés de médecine et les hôpitaux avec l'enseignement post-universitaire.

D'une manière ou d'une autre, la formation continue est en interaction avec la documentation. L'informatique, les nouvelles technologies (CDROM), les banques de données (300 dans le domaine biomédical) ont révolutionné l'accès à la documentation médicale. Impulsés par la nécessité pour les médecins d'être informé le plus rapidement et complètement possible, les bibliothèques et centres de documentation ont très vite adopté ces technologies, et organisent des cours de formation à leur utilisation.

L' A.F.M.H.A (Association pour la Formation des Médecins Hospitaliers à la gestion Administrative- Hôtel-Dieu-Paris), propose, depuis 1992, des sessions de formation avec pour thème "Les Nouvelles Technologies au service de la Documentation Médicale" : une douzaine de praticiens hospitaliers sont ainsi initiés, durant deux jours, à tous les nouveaux produits offerts par la technologie actuelle : accès Minitel, banques de données classiques ASCII ou sur disquettes, CDROM bibliographiques ou présentant des périodiques scientifiques en texte intégral.

Archives médicales et documentation

Dans les hôpitaux, le dossier du patient est géré par un service d'Archives médicales en relation étroite avec les Départements d'Information Médicale (DIM). Ces DIM sont sous la responsabilité d'un médecin et codifie toute l'activité hospitalière : durée de séjour, patients traités, pathologies. De plus en plus, DIM et documentation médicale sont couplés : la conséquence d'un tel regroupement est une meilleure circulation de l'information de santé en général centrée autour du patient (avec une interaction possible entre la lecture d'un article scientifique, son adaptation avec un cas traité dans un service de soins et la codification de ce cas), et une approche originale, quasi expérimentale et complémentaire des métiers de documentaliste, bibliothécaire et archiviste dans un cadre institutionnel.

Les infirmières

Le bibliothécaire de santé voit son rôle élargi à d'autres populations, celle des infirmier(e)s dans les Instituts de Formation en Soins Infirmiers (IFSI, qui ont remplacé les écoles d'infirmières), des cadres infirmiers et cadres infirmiers supérieurs dans les écoles de cadres. Pour les premiers, il s'agit surtout, depuis la récente réforme du diplôme d'Etat en 1992, de s'adapter au module obligatoire de recherche. Cela passe par des études ponctuelles sur des sujets étudiés en cours et la rédaction d'un mémoire de fin d'études. Pour les seconds, c'est l'évolution dans la carrière qui est envisagé avec également la rédaction d'un mémoire. Depuis peu, les Instituts et Ecoles ont intégré un module de recherche documentaire en faisant appel à des bibliothécaires ou documentalistes (c'est le cas à l'AP-HP, dans des écoles de cadres ou des instituts de formation en soins infirmiers).
A l'instar de la population médicale, le corps infirmier, à toutes les étapes de sa carrière, se doit de se former et de s'informer : les techniques évoluent, les rapports au malade également. Une réflexion sur les soins infirmiers a émergé ces dernières années, et cette réflexion passe obligatoirement par un savoir bien intégré.

Le bibliothécaire médical, médiateur de l'information

Ainsi, le bibliothécaire médical voit son champ d'action s'élargir en fonction de la diversité des demandes et des types d'utilisateurs, et également de l'évolution des technologies qu'il lui faut dominer et maîtriser. L'impulsion donnée par la connaissance scientifique est un des moteurs essentiels qui font de cette branche spécialisée de la documentation, un domaine évolutif, passionnant et ouvert sur un avenir prometteur.

cop. JP Accart, 2007

 

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